Pourquoi nous ne voulons pas du contrôle technique ?

Lorsque le contrôle technique des automobiles a été mis en place, 17 % des accidents étaient liés à l’état de la voiture.

Pour les motos , les études les plus détaillées et les plus récentes ne mettent l’état du véhicule en cause que dans 0,3 % des accidents

(Source : Rapport MAIDS et statistiques d’assurance)

En 2007, le Conseil général des Ponts et Chaussées reconnaissait ainsi, dans un premier rapport officiel sur le contrôle technique des 2RM, qu’il était :

«difficile d’établir une corrélation entre l’état du véhicule et la survenance des accidents ».

Toujours en 2007, l’ONISR (Observatoire National Interministériel de la Sécurité Routière) indiquait

« le contrôle technique périodique n’a pas d’effet sur la sécurité routière »

« il n’apparaît pas opportun d’étendre la mesure aux motocyclettes ».

En 2012, deux décisions, rendues réciproquement par la Commission du développement durable du Sénat et la Commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale, confirment le rejet de la proposition de la Commission européenne d’intensifier le contrôle technique des autos et d’instaurer celui des motos.

D’ailleurs, les chiffres de l’accidentalité montrent que ce sont les véhicules les plus récents, et donc ceux qui ne sont pas soumis au contrôle technique, qui sont les plus impliqués dans les accidents de la circulation.

Cela n’a rien d’étonnant lorsqu’on sait que la majorité des accidents impliquant des 2RM ont pour origine des défaillances humaines ( à plus de 80 % selon le rapport MAIDS précité).

Une bonne connaissance de l’accidentologie moto montre également que ce sont aussi la fragilité des usagers 2RM, et dans une moindre mesure des problèmes d’infrastructures inadaptées, auxquels les deux roues sont plus particulièrement sensibles.

0.3 % versus 30 % : injustice et manipulations

Selon le dernier rapport de l’ONISR sur l’accidentalité 2021 (voir extrait concerné), pas moins de 30 % des accidents comportent un facteur causal lié à l’infrastructure.

À comparer aux 0.3 % d’accidents liés à un défaut technique du véhicule relevés dans le rapport MAIDS !

Si on sait compter, l’infrastructure routière serait donc entre dix et cent fois plus accidentogène que l’état du véhicule ?

Le contrôle de l’état de son véhicule fait d’ailleurs partie intégrante de la formation et de l’examen au permis de conduite moto.

De fait, un contrôle périodique obligatoire de l’état des 2 et 3 RM s’avèrerait complètement inutile du point de vue de la sécurité routière.

Ce serait une mauvaise réponse à une question qui ne se pose même pas !

Il y a donc bien mieux à faire si l’on se préoccupe réellement de la sécurité des utilisateurs de deux roues motorisés. Vous pouvez retrouver une documentation abondante à ce sujet sur le site de la FFMC.

Restent les questions environnementales, et il est légitime de se poser la question de l’impact positif que pourrait avoir un contrôle des deux roues motorisés sur ces aspects. Mais son intérêt ne résiste pas longtemps à une analyse un peu poussée…

Le bruit du moteur…

Les nuisances sonores sont une vraie question dont la FFMC se préoccupe depuis sa création.

Ceux qui prétendent que le "bruit sauve des vies" sont dans l’erreur et feraient mieux de rouler plus doucement, si la sécurité est vraiment leur principale préoccupation. (ce simple point mériterait un plus long développement).

Notre page http://bruit.ffmc.fr/ présente notamment notre dernière campagne de communication à ce sujet.

Est-ce à dire que le contrôle technique permettrait de résoudre ce problème ? Hélas non.

D’une part le bruit n’est pas mesuré lors du contrôle technique voiture et ne le serait pas plus pour un éventuel contrôle technique moto, comme nous l’ont confirmé les réseaux de contrôle technique.

Par ailleurs , en Allemagne où existe un contrôle technique moto depuis plus de 20 ans, le problème du bruit excessif de certains deux roues est encore plus prégnant.

Pour preuve : l’interdiction de certaines routes aux motos pour cause de bruit excessif dans ce pays.

C’est la démonstration qu’un contrôle périodique des véhicules ne résout pas les problèmes de bruit.

…et l’odeur !

Subsiste la question de la protection de l’environnement.

La FFMC y attache une grande importance. Les motards sont les premiers à respirer la pollution automobile.

La FFMC pense au contraire que le deux-roues motorisé est justement une des solutions de mobilité les plus prometteuses pour diminuer drastiquement les émissions de pollution et de CO2.

On constate jusqu'à 50% de CO2 en moins pour un trajet type Paris-Banlieue en 2RM par rapport à une voiture !

Source ADEME.

La FFMC a ainsi suivi et accompagné la mise en place des normes européennes de pollution (Aujourd’hui Euro5b pour les 2RM) afin d’améliorer encore davantage la performance environnementale des motos, malgré les contraintes fortes que cela fait porter sur la fabrication et l’entretien de nos véhicules.

Contrôle Technique , l’ADEME émet des réserves

"Concernant le contrôle technique dont un décret et un projet d’arrêté sont actuellement en phase de consultation publique, il sera intéressant de quantifier l’impact de sa mise en place sur les impacts environnementaux du 2 roues motorisés. À noter également que des non-conformités (silencieux d’échappement non homologués notamment, représentés par les courbes rouges des graphes ci-dessous) peuvent être dissimulés au contrôle par la relative simplicité et rapidité de permutation avec l’échappement d’origine.

Enfin, certains impacts ne peuvent être adressés par le contrôle technique : les émissions sonores de 2/3RM conformes peuvent devenir gênantes par le simple fait d’un style de conduite agressif [...]. Ce facteur comportemental important n’est pas impacté par la mise en place du contrôle technique."

ADEME, Rapport 2023

Des alternatives existent !

Plutôt que ce contrôle technique inutile, la FFMC a travaillé avec le ministère des transports pour pouvoir, comme le permet la directive européenne 2014/45, déroger au contrôle technique par l’instauration de mesures alternatives qui seraient plus à même d’améliorer, tant la sécurité, que la performance environnementale des deux-roues motorisés.

Ces mesures touchent tant à la formation des conducteurs, qu’à leurs équipements de protection (casque, airbag, …), au renouvellement du parc et à l’utilisation de motorisations alternatives, ou à la détection des véhicules réellement bruyants en circulation.

Lire à ce sujet cet article (déjà ancien, car ces mesures ont été complétées depuis par d’autres plus étendues).

Un Contrôle technique pour Sécuriser les transactions entre particuliers ?

Un argument souvent avancé pour légitimer un contrôle technique moto est celui de sécuriser les transactions entre particuliers.

L’argument est fallacieux. D’une part parce que les transactions entre particuliers sont déjà couvertes par la garantie contre les vices cachés.

Mais surtout car le contrôle technique n’est absolument pas une garantie : en cas de problème le centre de contrôle technique n’est pas directement responsable, c’est le vendeur du véhicule qui reste responsable.

Pour mettre en cause le CT, il faut que l’acheteur exerce une action en justice contre le vendeur et celui ci peut alors se retourner contre le CT.

C’est bon pour les voitures, c’est bon pour les motos ?

Au-delà des doutes que l’on peut avoir sur l’impact positif du contrôle technique des automobiles, ce type de raisonnement qui consiste à plaquer sur un mode de transport des solutions éprouvées sur d’autres nous mène droit vers des motos équipées de ceinture de sécurité, ou au port du casque obligatoire pour les piétons…

Les deux-roues à moteur sont des véhicules spécifiques qui présentent des avantages et des inconvénients mais en tout cas nécessitent des mesures adaptées à leurs spécificités : fragilité des usagers, prise en compte de la diversité des usages dans le partage de la route, et adaptation, le cas échéant, des infrastructures routières à leurs particularités, …

Et pour les cyclomoteurs ?

La FFMC reconnaît que la question du contrôle technique peut se poser de manière différente en ce qui concerne les cyclomoteurs (risques liés au « débridage », très à la mode chez les ados notamment, et destinés à un public d’usagers mal ou pas formés).

Néanmoins la durée de vie d’un cyclo ne permet pas à un CT d’être une solution à cette question.  

La solution doit passer par une responsabilisation des parents et l’implication des professionnels dans le cadre de la formation au permis AM.

Il est de toute façon clair qu’un contrôle technique des cyclos ne résoudra pas les problèmes de comportements sur la route de certains de leurs usagers, alors qu’une formation adaptée a tout son rôle à jouer.

En Conclusion…

C’est compliqué et ça ne sert à rien
Ça coûtera cher à l’usager… mais ça rapportera à l’état et aux intérêts privés
Ça déresponsabilise l’usager
Ça n’apportera pas d’amélioration pour l’environnement ni pour la sécurité

Mais ça permettra aux pouvoirs publics de prétendre faire quelque chose pour la moto, tout en évitant de se poser les vraies questions de l’insécurité routière des 2RM (formation des conducteurs, équipements, infrastructures, comportements inadaptés, … )

A l’heure où chaque fait-divers amène son cortège de propositions de lois, faut-il s’en étonner ?

Le lobbying intense des chaînes de contrôle technique qui ont flairé le marché juteux des 25 millions de deux-roues à moteur en Europe a obtenu gain de cause. Pourtant, d’après les professionnels de la moto interrogés par l’Officiel du Cycle et du Motocycle, un centre de contrôle technique moto s’avérerait très difficile à rentabiliser : la technicité et la spécificité d’un contrôle moto le rendent beaucoup plus compliqué à mettre en œuvre que pour la voiture.

Cela pourrait amener certaines désillusions qui ne manqueront pas de se transformer en ponctions supplémentaires dans la poche de l’usager motard !

A l’heure où le pouvoir d’achat fait partie des principales préoccupations des français, une telle mesure reviendrait à détourner des dizaines de millions d’euros supplémentaires des usagers de la route vers des entreprises privées.

En l’absence de justification sérieuse, et face au coût de la mise en place d’un contrôle technique, la FFMC réaffirme son opposition à la mise en place d’un contrôle technique pour les motos qui ne serait qu’une contrainte bureaucratique de plus sans bénéfice du point de vue de la sécurité ni de l’environnement.

Au-delà du sujet qui nous préoccupe, la FFMC dénonce le développement progressif d’une société du contrôle qui déresponsabilise les citoyens.

Pour toutes ces raisons, la Fédération Française des Motards en Colère appelle au boycott du contrôle technique deux-roues motorisés, des centres qui le réalisent et lance l’outil #balancetoncentre pour signaler et répertorier les professionnels du contrôle technique désireux de mettre en place cette aberration.

Le message est clair : « Tu veux ma moto ? Tu ne verras plus jamais mon auto ! »

Nous taperons au portefeuille des centres
DEKRA et consorts, afin de préserver nos libertés.


Ensemble, plus forts !